
La coutume est respectable. Elle consacre l’identité kanak dans les relations sociales, les rapports hiérarchiques, le lien à la terre, les mythes et le rapport avec les morts. Avec la langue propre du groupe social inscrit dans la coutume du lieu géographiquement déterminé, elle fondait les « premières nations » d’avant la colonisation.
Enfreindre les règles était passible de plusieurs punitions, et ces dernières étaient essentielles pour leur respect. Ces punitions pouvaient aller jusqu’à la flagellation, la mise au ban, l’exclusion du groupe et de son territoire, et même la mort.
Dans la société d’alors, cette organisation était nécessaire pour maintenir l’ordre et les équilibres, garants de la vie harmonieuse du groupe. Mais au troisième millénaire, la situation à Belep montre qu’il n’est plus possible d’appliquer strictement les règles coutumières dans une société qui a accédé à la Démocratie.
La colonisation a été marquée par « des ombres et des lumières », comme l’on dit. Pour les indépendantistes, il n’est question que des ombres. Pourtant, la démocratie, apportée ici avec notamment des règles de justice et de respect des libertés, fait partie des lumières.
D’ailleurs, dans un premier temps, protection et enquête ont été apportés à Belep par les militaires de l’Etat que les séparatistes présentent généralement comme « colonial« .
Pour le reste, sur l’île, la sanction coutumière est tombée : expulsion de l’île de toutes les familles d’un même clan, c’est à dire 80 personnes. Question fondamentale : est-ce un clan originaire de Belep, ou un clan accueilli ?
S’il y a été accueilli, parce que privé de ses terres par la colonisation, la situation fait partie des « ombres ». Elle mériterait une réflexion démocratique collective.
S’il en est originaire, alors il rejoindra la cohorte des kanak sans terre, et cette privation ne sera pas une « ombre » de la colonisation. Les exclus de Lifou et d’ailleurs, lors des événements, en font toujours partie.
Quoi qu’il en soit, voilà une situation qui montre les limites de la coutume dans un régime démocratique.
A certains égards, la coutume est efficace. Mais pour le reste, elle laisse aux tiers le soin de régler le sort des exclus. Autrefois, il n’existait pas de tiers. C’était la lutte pour la survie. Aujourd’hui, les tiers sont les services publics et les dispositifs de solidarité, lesquels sont financés par les contribuables.
Alors se pose une question, à nouveau : le refuge des exclus de Belep sera-t-il à la charge de la province Sud ? Nul doute que la province Nord, cette fois, fera le nécessaire pour l’accueil de ces familles. Ou peut être, la province des Iles. Enfin, on verra.