Face aux enjeux d’avenir de la Nouvelle-Calédonie, et à ceux du pouvoir, notamment en province Nord, les deux grandes formations indépendantistes cultivent leurs différences. On avait eu un avant-goût de cette compétition lors de la prise de pouvoir au gouvernement. La rivalité avait duré pas moins d’une demie-année entre d’un côté, l’Union Calédonienne et son allié l’Éveil Océanien, et de l’autre, le Palika soutenu par l’UPM. C’est, se souvient-on, le parti travailliste, émanation politique de l’USTK, qui avait changé les règles du jeu en mettant à égalité les candidats respectifs de deux grands courants : Louis Mapou et Samuel Népeune.
Le combat fratricide avait finalement tourné à l’avantage de l’ancien dirigeant de la Sofinor. Quant à Samuel Nepeune, selon la formule romaine de « malheur aux vaincus », il a progressivement été liquidé par ses amis après avoir démissionné du gouvernement. Ils n’ont même pas fait appel à lui à Aircalin, alors qu’il était probablement le plus compétent pour prendre la succession de Didier Tappero, directeur général sortant et atteint par l’âge de la retraite.
« QUELQUES CAFOUILLAGES »
Bien sûr, pour ne pas accentuer davantage le fossé qui se creuse, le groupe Uni a voté en faveur de Roch Wamytan pour la présidence du Congrès. Mais au fil des mois, l’alignement des positions indépendantistes s’est effrité. Ainsi, lors de la première invitation à Paris, en juin 2021, seule l’UC s’est déplacée. L’unité s’était recréée pour dénoncer la date du troisième référendum et boycotter le scrutin. Depuis, quelques cafouillages sont apparus au fil des sujets traités au Congrès. Sur la taxation du nickel, sur la transition énergétique, et plus récemment, lors de la visite du président de la République.
Mais la divergence la plus nette concerne le corps électoral. Va-t-elle s’aplanir ? Il faudrait alors que le Palika revienne sur des positions affichées publiquement, notamment lors de sa dernière assemblée générale, en juin dernier : accord pour le dégel, avec un corps glissant à 10 ans de présence. « C’est une durée raisonnable pour des Calédoniens qui veulent s’installer et qui vont devenir des citoyens de ce pays. Parce que ce que nous voulons également, c’est former le peuple calédonien« , avait alors déclaré Jean-Pierre Djaiwe.
L’Union Calédonienne, sur ce sujet comme d’ailleurs sur les autres, campe sur une posture radicale. « Nous avons dit OK pour ouvrir le chantier du corps électoral. C’est tout. Il n’y aura pas d’accord isolé, il nous faut savoir où nous allons, donc il nous faudra un accord global », avait déclaré Gilbert Tyuienon. Le parti vient de confirmer son intransigeance en fustigeant la méthode de « l’État Macron », et en décidant, en même temps, de ne participer à aucune rencontre avec les représentants de l’État jusqu’à son congrès en novembre.
« QUI VA PARTICIPER
À LA RÉUNION PROGRAMMÉE PAR DARMANIN ? »
Or, l’UPM, fidèle allié du Palika, et qui participe à l’Exécutif de la province Nord, vient de réunir son comité central à Poya pour rendre compte des discussions qui viennent de se dérouler à Paris. Le parti a indiqué qu’il poursuivrait, lui, ces discussions avec l’État, marquant ainsi une rupture avec la position de l’Union Calédonienne.
Le Palika n’a pas fait connaître sa position, mais il ne serait pas étonnant qu’il s’inscrive dans la voie indiquée par son allié.
Si ces positions étaient confirmées, elles seraient de nature à conforter l’intention de Gérald Darmanin de venir en Nouvelle-Calédonie au mois d’octobre, dans la suite des rencontres opérées à Paris il y a quelques semaines. La présence de l’Uni, et l’absence de l’UC mettraient alors au grand jour une divergence dont on peut difficilement mesurer les conséquences.
« LES PROVINCIALES
DANS MOINS D’UN AN … »
Mais dans le fond, elle ne serait que le prélude à la lutte sans merci que s’apprêtent à livrer les deux grandes mouvances indépendantistes pour obtenir la majorité et la présidence dans les provinces Nord et Iles.