Gel ou dégel ? Ce terme imagé de “gel” masque l’atteinte aux fondamentaux provoquée par la mesure adoptée en 2007 sous l’égide de Jacques Chirac, président de la République, alors que François Baroin était ministre des Outre-mer, et Philippe Bas, ministre du gouvernement Villepin. Presque seul au Sénat, Bruno Retailleau s’y était opposé aux côtés de Simon Louekhote, dénonçant alors un “déni de démocratie”. C’est bien de cela dont il s’agit, car au delà du “gel”, du “dégel”, mots plus proches de congélation ou de la surgélation, c’est bien d’un droit fondamental des démocraties qui est en cause : celui de la liberté de suffrage.
Cette liberté, essentielle dans la Charte des Droits de l’Homme et du Citoyen, a d’abord été instaurée par la France de la révolution de 1789, puis par celle de la IIe République, et enfin par le général de Gaulle en 1944. Aujourd’hui, la liberté de suffrage fait partie des libertés fondamentales portées par l’Union européenne et par l’Organisation des Nations Unies.
Dans toutes les démocraties, le droit de vote est considéré, à la fois, comme un droit fondamental des citoyens, mais également comme le fondement de la légitimité des élus. C’est un des raisons pour lesquelles, le nombre des “exclus” des élections provinciales et du Congrès, ces institutions déterminant les impôts permettant le fonctionnement des services publics, ainsi que les réglementations dictant la vie en société, justifie le rétablissement de la liberté de suffrage.
C’est dans ce cadre que s’inscrit l’examen du projet de loi constitutionnelle sur la Nouvelle-Calédonie au Parlement. Comment imaginer que les Sénateurs et les Députés admettent que sur le territoire de la République, soit portée plus longtemps une grave atteinte aux libertés fondamentales garanties par la Constitution ?
En 1998, lors de la signature de l’Accord de Nouméa, la condition de 10 ans de résidence pour participer aux élections provinciales avait bel et bien été acceptée et signée par les parties. Les services du Premier ministre Lionel Jospin, avaient même publié une note explicative sur le “corps électoral glissant”.
Il s’agit donc aujourd’hui, non seulement de restaurer une liberté fondamentale pour les Calédoniens, mais également de s’inspirer des dispositions mises en vigueur lors de l’établissement d’un accord dont tout le monde se réclame : l’Accord de Nouméa.