Si les exactions ont eu des répercussions profondes sur l’économie, elles ont également impacté le tissu associatif. Or, certaines associations vitales pour le service public sont en péril. Privées de subventions, elles peinent à survivre, menaçant ainsi l’accès à des services essentiels pour les plus vulnérables.
« Les associations sont dans une situation absolument dramatique, au même titre que les entreprises, explique Thibault Bizien, co-fondateur de Caledoclean. Pourtant, personne n’en parle. Le problème, c’est que, outre sauver l’emploi, il faut aussi sauver le service parce qu’une énorme partie de la société calédonienne repose sur les associations. C’est le cas dans l’environnement, la culture, le sport, mais également dans la santé, dans le social et dans l’éducation. Ces associations, qui font du service d’intérêt général, sont en train de mourir ». Thibault donne notamment l’exemple des structures qui œuvrent auprès des personnes les plus vulnérables, par exemple en situation de handicap, souffrant de certaines maladies ou encore les personnes âgées. « Ce sont généralement des personnes extrêmement isolées, complète-t-il. Ils vont perdre les rares personnes qui passaient chez eux régulièrement, parce que ce sont des associations qui offraient ce service, et ces associations vont potentiellement cesser d’exister ».
Des subventions qui ne sont jamais arrivées
On pourrait penser que la plupart des associations vont minimalement tenir jusqu’à la fin de l’année avec la subvention reçue pour l’année 2024. Malheureusement, malgré le fait que les subventions aient été votées, donc validées par les institutions, elles n’ont jamais été versées à certaines associations. Ces dernières survivent sur leur trésorerie, qui, on peut le comprendre, commence sérieusement à se tarir.
Un service public externalisé
Au fil du temps, le secteur public a externalisé une partie de ses services en les confiant à des associations. Ainsi, les structures associatives ont pris le relais du public, devenant essentiel pour le bon fonctionnement de la société calédonienne. Le problème qui se pose aujourd’hui, c’est que les associations ne sont pas prioritaires : les institutions vont d’abord tenter de trouver les fonds pour payer leurs propres fonctionnaires, ce qui est tout à fait normal. Néanmoins, quid des associations qui œuvrent dans un domaine essentiel au public, et sont en fait une extension des collectivités ? En arrêtant de les subventionner, on met gravement en danger une partie de la population, surtout les plus vulnérables. « Si demain, j’arrête de planter des arbres, c’est mauvais sur le long terme, mais sur le court terme, tout le monde s’en fiche. Par contre, les gens qui sont en situation de handicap, malades, fragiles ou dans une immense précarité; les enfants qui ont besoin de services périscolaires, d’un centre de vacances ou de loisirs, d’une intervention scolaire… On parle de santé, d’éducation, d’inclusivité. Tout cela est primordial, essentiel, ce sont des services publics qui doivent absolument être maintenus. Si demain, ce type d’association arrête de fonctionner, cela coûtera plus cher aux collectivités de mettre en place ce service – qui est essentiel, donc qui doit être mis en place – que de continuer à le déléguer à une association », illustre Thibault.
Les associations, grandes oubliées des aides d’urgences
Certaines associations sont quasiment comme des entreprises : elles emploient des salariés et payent des cotisations. « Les associations aussi participent à l’économie, on parle de centaines d’emplois et de milliards de francs pacifiques générés, affirme le co-fondateur de Caledoclean. Pourtant, elles sont exclues du dispositif d’aide aux entreprises. Aujourd’hui, les associations sont seules, pas de subvention, pas d’aide. Si auparavant, le co-financement était possible, aujourd’hui c’est très compliqué : il n’y a plus de marchés publics, les entreprises sont en situation critique donc plus de mécénat, les gens n’ont plus d’emplois donc plus de dons… Si l’État n’intervient pas, on devra demander à d’autres territoires ou organisations mondiales de soutenir les associations essentielles, il en va de la situation sociale, sanitaire et éducative de la Nouvelle-Calédonie ».
Rendez-vous le jeudi 29 août
Jeudi 29 août, les associations sont invitées à se réunir à la FOL dans l’objectif de relancer le Collectif des Associations. « C’est une structure créée en 2014, qui réunissait 70 membres à l’époque, et qui avait pour objectif de travailler à la structuration de la vie associative sur le territoire, rappelle Thibault. Son rôle était de proposer des mesures favorisant l’essor de la vie associative, en améliorant notamment l’organisation et le contrôle des associations. Une charte avait été réalisée en collaboration avec le gouvernement et l’État, mais tout a été abandonné par les institutions ». Se rassembler pour être plus forts, et parler d’une seule voix afin de se faire entendre par l’État et le gouvernement, voici ce qui attend les associations jeudi prochain. « L’idée, c’est d’abord de trouver des solutions pour que le tissu associatif survive à la crise, puis ensuite continuer le travail débuté par le Collectif », conclut-il.
Kim Jandot