Le gouvernement de Louis Mapou est tombé aujourd’hui. C’est un véritable coup de tonnerre dans le ciel politique calédonien en ce jour de Noël, et dont la rumeur avait déjà parcouru les couloirs du Congrès à la fin de la séance de lundi après-midi.
La chute a été déclenchée par la démission de l’ensemble de la liste Calédonie ensemble. Dans une lettre adressée au président du gouvernement dans la journée, le parti justifie son initiative, par ce qu’il considère être une évolution de l’exécutif du territoire vers « une instance indépendante et particulièrement des groupes politiques du congrès, dont il est issu, qu’ils soient d’ailleurs indépendantistes comme non indépendantistes ».
Pour illustrer ce qu’il considère comme une quasi-rupture entre le législatif calédonien et son gouvernement, Calédonie Ensemble cite « la bérézina, politique que vous avez subie sur le Pacte Nickel ». « Cette indépendance gouvernementale autoproclamée, contraire à l’Accord de Nouméa et à la loi organique, vous a ainsi conduit, monsieur le Président, à décider d’endetter le pays à hauteur de 120 milliards CFP, sans l’autorisation de quiconque, à tenter d’infliger, 15 milliards d’impôts, nouveaux aux calédonien, et, de manière plus générale, à pratiquer la politique du fait accompli devant le congrès, sous la houlette diligente de Bercy ».
S’ajoute à ces griefs l’affaire de l’achat des Airbus par Aircalin pour un montant annoncé de 46 milliards, une opération que le Congrès a appris « comme tous les Calédoniens », alors qu’une simple esquisse du projet avait été présentée à la Commission des Infrastructures de l’institution.
Enfin, ultime reproche, le cheminement du Plan S2R, « sans aborder le Plan quinquennal délibéré à la quasi-unanimité du congrès le 28 août 2024 et soutenu par toutes les institutions (Congrès, Provinces, communes, Sénat coutumier) ainsi que les parlementaires ».
Que va-t-il se passer à présent ?
Selon l’article 121 de la loi organique, et alors que le gouvernement est sorti de la période au cours de laquelle il peut être censuré, ou tomber à la suite de la démission de l’ensemble d’une liste, « il est procédé à l’élection d’un nouveau gouvernement dans un délai de quinze jours. Le haut-commissaire en est informé sans délai. Le gouvernement démissionnaire assure l’expédition des affaires courantes jusqu’à l’élection d’un nouveau gouvernement ».
Dans le cas présent, la démission de M. Katidjo-Monnier et de ses suivants de liste ayant provoqué la chute du gouvernement, l’élection du nouvel Exécutif doit donc intervenir dans un délai maximum de 15 jours.
Dès lors, plusieurs questions se posent.
D’abord, sur la procédure exigée par Bercy pour valider le transfert à la Nouvelle-Calédonie des 27,5 milliards acceptés sous conditions. Les autorités du territoire répondront-elles à ces conditions, dans la forme et le fond, et dans les délais impartis ?
Quant à la suite, il est encore trop tôt pour l’envisager avec davantage de précisions. Deux cas de figure peuvent se présenter. Dans le premier, la chute a été provoquée sans qu’une solution n’ait été envisagée pour construire une nouvelle majorité au gouvernement, laquelle répondrait aux griefs formulés par Calédonie Ensemble. C’est peu probable.
La seconde, a contrario, suppose qu’un accord préalable ait été conclu par plusieurs groupes politiques en mesure de constituer cette majorité nécessaire. Une chose est certaine. Compte tenu de l’arithmétique présidant à la répartition des sièges de l’Exécutif selon la règle de la proportionnelle, si les non-indépendantistes se mettaient d’accord, leurs seules représentations ne suffiraient pas, et il faudrait y ajouter, soit les voix de l’Éveil Océanien, soit celles d’un parti indépendantiste. Les heures qui viennent vont, sans aucun doute, éclairer cette problématique, alors que, hasard du calendrier, le gouvernement central, lui-même récemment censuré, vient tout juste de se mettre en place …
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