Résumé : la compagnie Prentout-Leblond, armateur de Rouen, a fait construire le France II considéré comme le plus beau voilier du monde. Le France II va effectuer des transports entre la Nouvelle-Calédonie et la métropole, mais Henri Prentout-Leblond meurt en 1915 et le France II est racheté. Après-guerre, ses moteurs tombent en panne et ne sont pas réparés. Cela lui sera fatal.
La compagnie des Navires Mixtes décide ce que n’aurait jamais admis Henri-Victor Prentout : les deux moteurs diesels sont enlevés purement et simplement au lendemain de la guerre. Certes, le navire magnifiquement taillé, superbement gréé, file sur les mers aussi vite que lorsqu’il avait ses moteurs, par bon vent. Mais c’est le deuxième épisode de sa fin : cette transformation lui sera en effet fatale.
En Nouvelle-Calédonie, la position de la Société le Nickel s’est confortée. A la mort, en 1919, d’un pionnier éminent du secteur, Lucien Bernheim, président et principal actionnaire la Société «Le Chrome» qu’il avait fondée en 1905, le Nickel rachète ses titres, et surtout, une concession de chute d’eau importante dont elle a déjà commencé les travaux d’aménagement dans la région de Yaté. La société le Nickel y entreprendra la construction d’installation hydro-électriques, ainsi que celle d’un premier four électrique, issu d’une technologie nouvelle de fusion. Son président, M. Tambour, ne verra pas l’achèvement de ces travaux puisqu’il meurt en 1922.
La Nouvelle-Calédonie, grand producteur de nickel, a repris des couleurs après la fin du premier conflit mondial. Nous sommes le 4 juillet de cette année. L’équipage du France II hisse les voiles, et le majestueux navire, uniquement porté par les vents, quitte le port de Thio où il vient de décharger une cargaison de ciment. Il remonte toute la côte Est vers le nord, puis passe à l’extérieur du lagon Ouest pour mettre le cap vers Pouembout. Là, il doit y prendre un chargement de nickel à destination de l’Europe.
La cargaison à bord, et alourdi, le cinq mâts barque met les voiles vers Nouméa, tandis que le temps se gâte et que la mer devient menaçante. Le 11 juillet, le capitaine décide de se mettre à l’abri. C’est la passe de Moindou et le mouillage à l’abri du grand récif qui sont choisis en raison de leur proximité.
Malheureusement, dans la nuit du 11 au 12 juillet, les éléments se déchaînent. Le mouillage du navire, fortement chargé ne tient pas. Au cours de la nuit, le vent faiblit, mais la houle est très forte. Au milieu des patates de corail, le voilier est incapable de manœuvrer. Avec ses deux puissant moteurs diésels Schneider de 900 chevaux chacun, cette situation périlleuse aurait été surmontée sans grande difficulté. Mais ils ont été retirés. Le France II est pris au piège. Le Commandant, impuissant, ne peut que constater la situation périlleuse dans laquelle se trouve le navire. Il ne peut compter sur aucune aide extérieure. Finalement, dans un grand fracas glaçant, le géant des mers est drossé sur les patates de corail, et, finalement s’échoue sur le récif, en face de Moindou. C’en est fait du France II, orgueil de son premier armateurs, et qui aurait également dû être l’orgueil de la France.
Devant la catastrophe, les armateurs hésitent. Ils font appel à un puissant remorqueur australien qui vient sur les lieux. Mais les frêts ont baissé, la marine marchande est en plein marasme, les navires se vendent à vil prix. La compagnie propriétaire décide de l’abandonner, en raison des coûts à supporter, et des perspectives commerciales peu encourageantes. La France II, après avoir été la gloire de la marine marchande française, n’est plus qu’une épave.
AVANT l’ÉPILOGUE DE CETTE FABULEUSE ÉPOPÉE, DÉCOUVREZ UN TÉMOIGNAGE DE LUCIEN LEFÈVRE, CAPITAINE EN SECOND DU FRANCE II, DONT UNE PARTIE DES DESCENDANTS EST BIEN CONNUE À NOUMÉA, SAMEDI PROCHAIN.