Depuis le 13 mai, la Nouvelle-Calédonie traverse une crise sociale de grande ampleur, dont les conséquences se feront ressentir encore longtemps. Si certains ont pris la décision de quitter le Caillou, d’autres souhaitent reconstruire. Rencontre avec ceux qui font le pari de l’avenir en Calédonie.
Jérôme Roumagne est un jeune réalisateur bien connu des Calédoniens. Sa famille est sur le territoire depuis cinq générations. « J’ai toujours vécu ici, si ce n’est pour mes études pour lesquelles je suis parti huit ans », explique-t-il. S’il n’a pas connu les Évènements, il en a néanmoins beaucoup entendu parler de la part de ses parents et grands-parents. Depuis un mois, il est passé par toutes les émotions : l’inquiétude, la déception, et aussi la colère, admet-il. Il est aussi conscient des impacts qu’aura cette crise sur son secteur professionnel, des impacts déjà visibles. D’ici la fin de l’année, il devait travailler sur trois projets : l’un est reporté, et les deux autres sont annulés. Sans compter les conséquences à long terme : « j’étais en train de construire un gros projet prévu pour l’année prochaine, explique-t-il. Trouver de l’argent pour un projet culturel calédonien était déjà compliqué, mais dans le contexte actuel, cette difficulté s’accroît encore davantage ».
« Je me suis souvenu que la Nouvelle-Calédonie
est le seul endroit de la planète
où je me sens chez moi »
La question se pose alors : pourquoi rester, alors que les perspectives d’avenir dans son domaine sont compromises ? « Comme tout le monde, je suis passé par plusieurs phases, souligne-t-il. L’idée de partir m’a traversé l’esprit, mais je me suis souvenu que la Nouvelle-Calédonie est le seul endroit de la planète où je me sens chez moi. C’est un peu comme quand un membre de ta famille a un problème et que c’est le moment de l’aider. S’il y a bien un moment où on ne peut pas se permettre de quitter le navire… En plus, j’ai un métier où j’ai l’opportunité de porter la voix de certaines personnes qu’on n’entend pas, ou montrer certaines choses qu’on ne voit pas. C’est le moment où il faut utiliser son art pour redonner de l’espoir aux gens et participer à cette reconstruction qui va être colossale. On aura besoin de tout le monde, tout corps de métier confondu, pour aider cette reconstruction qui va être longue ».