À seulement 24 ans, Guillaume Sauray incarne une nouvelle génération de juristes. Originaire de Bourail, formé à l’Université de Nouvelle-Calédonie puis en métropole, il ambitionne aujourd’hui de devenir le premier mandataire judiciaire calédonien.
Né en 2000, Guillaume grandit à Bourail où il suit une scolarité classique jusqu’en troisième, avant de poursuivre ses études au lycée Blaise Pascal à Nouméa. Élève appliqué, il décroche un bac scientifique, mention assez bien, avant de s’orienter vers le droit à l’Université de la Nouvelle-Calédonie. « J’ai toujours été plutôt bon élève, mais c’est à l’UNC que j’ai vraiment trouvé ma voie », confie-t-il. Très vite, il se démarque dans sa licence par sa curiosité intellectuelle et son envie de comprendre les rouages du monde économique et juridique.
L’envie d’agir pour le territoire
Animé par l’envie profonde de contribuer au développement de son territoire, Guillaume s’interroge très tôt, dès sa première année de droit, sur la manière dont il pourrait mettre ses compétences au service de la Nouvelle-Calédonie. C’est un de ses enseignants qui va l’orienter vers une spécialisation peu connue mais essentielle : l’administration et la liquidation d’entreprises en difficulté. Mais derrière ce choix, il y a aussi une histoire plus personnelle : « Ce qui m’a vraiment donné envie d’aller dans cette voie, c’est que mon père, quand j’étais petit, a redressé une entreprise. Il m’en parle toujours avec une telle passion que ça m’a marqué, raconte-t-il. J’ai trouvé fascinant de me dire qu’une entreprise, même en grande difficulté, peut toujours avoir une chance de s’en sortir ». Il postule et intègre alors l’un des cinq masters les plus sélectifs de France dans ce domaine, à l’Université de Lyon III – Jean Moulin. Ce master pluridisciplinaire l’amène à jongler entre droit, comptabilité, finance, gestion stratégique et aspects psychosociaux liés à la faillite.
Accompagner l’humain
Au-delà de l’aspect purement juridique, Guillaume est sensible aux dimensions humaines de la liquidation d’entreprises. Il crée ainsi une section Responsabilité Sociétale et Environnementale (RSE) au sein de son association étudiante à Lyon, pour sensibiliser ses camarades à l’impact psychologique de ces procédures sur les chefs d’entreprise. « On parle de procédures, de chiffres, mais derrière il y a des hommes et des femmes. Certains vivent ça comme un échec personnel, et cela peut aller jusqu’au suicide. On a voulu mettre un peu d’humain dans notre formation », explique-t-il. Avec ses camarades, il établit des partenariats avec plusieurs associations d’aide aux entrepreneurs en détresse psychologique, comme APESA ou Second Souffle, apportant un soutien juridique tout en bénéficiant, en retour, de sensibilisations à ces problématiques.
Une formation soutenue par Cadre Avenir
Guillaume a bénéficié du dispositif Cadre Avenir, qui a financé ses études dans le cadre d’une stratégie de formation de compétences pour la Nouvelle-Calédonie. « Je suis très reconnaissant envers ce programme, souligne-t-il. Ils m’ont soutenu financièrement, mais aussi psychologiquement, avec un vrai suivi pédagogique».
De Lyon à Nouméa
Durant sa formation, Guillaume effectue un premier stage dans un grand cabinet d’avocats lyonnais, puis un second à la BCI en Nouvelle-Calédonie, où il travaille au sein de la direction des engagements et du service contentieux. Cette double expérience, en métropole et sur le territoire, lui permet de confronter théorie et pratique, de découvrir le métier, et d’en comprendre les spécificités locales. Depuis septembre 2022, il exerce aux côtés de Mary Laure Gastaud, mandataire judiciaire bien connue sur le territoire. « Elle m’a fait découvrir toutes les facettes du métier : comptabilité, gestion des actifs, vérification des créances… C’est un métier où si tu n’as pas de pratique, tu ne peux pas faire correctement ton travail », explique-t-il.
Un métier d’expertise… et d’empathie
Contrairement aux clichés, Guillaume refuse de voir la liquidation comme une machine froide et implacable. Pour lui, accompagner une entreprise en difficulté, c’est d’abord écouter, expliquer et rassurer. « Ce n’est pas un métier où l’on se réjouit du malheur des autres. Au contraire. On est là pour éviter que la situation s’aggrave, pour permettre aux entrepreneurs de rebondir », précise-t-il. Loin d’être déconnecté des réalités économiques, il observe avec attention le tissu entrepreneurial calédonien qui est marqué par une forte proportion de petites entreprises et de patentés, souvent fragilisés par des problèmes de gestion ou le contexte économique.
Une ambition claire : devenir le premier mandataire judiciaire calédonien
Aujourd’hui, Guillaume a déposé sa candidature pour figurer sur la liste des mandataires judiciaires habilités à exercer sur le territoire. « Si j’y suis inscrit, ce sera un aboutissement personnel, mais aussi un symbole fort pour la Calédonie car il n’y a jamais eu de Calédonien mandataire judiciaire », affirme-t-il. Cette inscription lui ouvrirait la voie vers une association avec Mary Laure Gastaud, dans la perspective, à terme, de reprendre l’étude.
Dans un contexte économique fragile, disposer de professionnels formés, compétents et ancrés localement est une nécessité. L’émergence de jeunes talents comme Guillaume, dont le projet de vie est intimement lié à l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, porte un message d’espoir : la jeunesse continue de croire en son territoire et de vouloir s’y engager pleinement. Une belle ambition au service du tissu entrepreneurial calédonien… qui en a plus que jamais besoin.
Kim Jandot
