Chaque année, des centaines d’élèves du Vanuatu bénéficient du matériel scolaire récupéré, trié et envoyé par l’association Écoles Pikinini NC. Une chaîne de solidarité calédonienne discrète mais essentielle.
Créée en 2007, l’association Écoles Pikinini Nouvelle-Calédonie œuvre pour améliorer les conditions d’apprentissage des élèves du Vanuatu. D’abord centrée sur le parrainage d’enfants, elle s’est adaptée au fil du temps pour répondre aux besoins changeants du terrain : si l’école primaire est aujourd’hui gratuite, les moyens pour assurer une scolarité de qualité, eux, manquent toujours cruellement. «?Depuis que l’école est devenue gratuite, les effectifs ont explosé, mais les établissements n’ont pas les moyens de suivre, explique Chantal, secrétaire de l’association. Ils manquent de tout : mobilier, fournitures, livres… C’est là que nous intervenons?».
Donner, trier, transmettre
Dans un grand dock mis à disposition par le GIEP (Groupement pour l’insertion et l’évolution professionnelles) à Nouville, une poignée de bénévoles s’active chaque semaine pour trier, réparer et conditionner le matériel récupéré sur le territoire. On parle ici de mobilier scolaire, de livres et de fournitures, souvent promis à la déchèterie. «?Nous ne conservons que ce qui est en bon état et qui pourra être utile sur place, précise Chantal. Certains passent même du temps à réhabiliter des dictionnaires, en refaisant les couvertures à la main. Il faut savoir qu’un dictionnaire coûte très cher à Port Vila ». Un des bénévoles de l’association, Bernard, est un spécialiste des reliures ! Il joue donc un rôle précieux dans la remise en état des dictionnaires. Chaque objet est soigneusement attribué à un établissement selon ses besoins. Les cartons sont numérotés, complétés pour éviter les doublons, puis expédiés par conteneur, en général deux fois par an. Lorsque les conteneurs arrivent, l’équipe se rend au Vanuatu afin de réceptionner les cargaisons. Là commence une course contre la montre : trier, dispatcher, réexpédier dans les îles (Santo, Tanna, Malicolo, Epi, Pentecôte, Anatom…). Une organisation quasi artisanale, rendue possible par les liens tissés localement. «?Notre présidente, Catherine Cabane, connaît très bien le Vanuatu, souligne Chantal. Elle a enseigné là-bas et garde des contacts avec de nombreux enseignants et directeurs d’établissement. Cela nous permet de répondre aux besoins réels du terrain. Et nos envois sont toujours très bien accueillis?». À Nouméa, plusieurs bénévoles participent activement à cette chaîne de solidarité : Cécile, Véronique, Myriam, Dominique, Martine et Fanny, aux côtés de Bernard. La gestion des finances est assurée avec rigueur par la trésorière, Berthie.
Un engagement sans faille malgré les difficultés
Les défis sont nombreux : catastrophes naturelles, infrastructures fragiles, et surtout, financements incertains. «?Envoyer un conteneur, cela coûte cher, déplore la secrétaire de l’association. Même si nous avons obtenu une exonération de droits de douane au Vanuatu, il faut financer le transport jusqu’au port de Nouméa, l’expédition maritime, puis la redistribution sur place. Par le passé, nous avions des subventions du gouvernement ou de la province Sud, mais aujourd’hui c’est beaucoup plus compliqué?». Pour pallier ce manque, l’association participe à des vide-greniers, revend une partie du matériel inutilisable sur place, et sollicite ponctuellement des aides, comme celle de l’ambassade de France à Port Vila, récemment obtenue.
Un appel à la générosité locale
En plus de l’aide financière, l’association lance un appel au don matériel : «?Nous avons besoin de mobilier scolaire, d’étagères, de bureaux… Pensez à nous avant de jeter !?». Aujourd’hui, Écoles Pikinini NC repose entièrement sur l’engagement bénévole. Mais la relève se fait attendre. «?Pour l’instant, nous avons des bénévoles motivés, mais il faudra penser à la suite. Ce serait dommage que tout ce travail s’arrête?», conclut Chantal. Dans un contexte où les besoins éducatifs sont immenses et les moyens limités, Écoles Pikinini NC incarne une solidarité pure, désintéressée et profondément humaine, entre la Nouvelle-Calédonie et son voisin mélanésien.
NDLR : le nom de l’association, Écoles Pikinini, fait référence au mot « pikinini », qui signifie « enfant » en bichelamar, la langue véhiculaire du Vanuatu. Un clin d’œil à la vocation première de l’association : soutenir la scolarisation des enfants.
Kim Jandot