Résumé : la compagnie Prentout-Leblond, armateur de Rouen, opérait un navire à propulsion mixte transportant du pétrole entre la France et les États-Unis. Elle décide de faire construire un nouveau navire, encore plus grand que le France I armé par la compagnie française Bordes. Le France II, construit dans les chantiers de la Gironde et notamment destiné à transporter du nickel pour les ateliers d’orfèvrerie Christofle, va effectuer son premier voyage qui le conduira en Nouvelle-Calédonie. Ce sera le début des soucis.
La vie, à bord du mastodonte, est luxueuse. Chaque jour, la TSF donne des nouvelles du monde entier. Bien sûr, comme on peut s’en douter, la nourriture est aussi abondante et aussi soignée que dans les meilleurs hôtels.
Enfin, détail extraordinaire, les salles de bain sont pourvues d’appareils modernes permettant l’hydrothérapie la plus complète. C’était l’embryon de la thalassothérapie bien avant l’heure !
Le Commandant Charcot, Président d’Honneur du Yacht Club de France, va d’ailleurs délivrer au France II le prestigieux Grand Guidon de la Ligue Maritime Française.
Nous sommes en 1913. Sorti fièrement des chantiers navals de la Gironde, le France II appareille pour Glasgow afin de faire le plein de coke et de charbon, puis en novembre, entreprend sa première croisière autour du monde.
La France a trop souvent boudé ses génies ou ses grands entrepreneurs. Ainsi ce premier départ du France II pour Glasgow passe pratiquement inaperçu. Louis Lacroix, le grand historien de la marine française, s’en désole alors qu’il est émerveillé par le France II, « le plus beau spécimen de ce qui avait été fait jusqu’alors » écrit-il. Et pourtant, poursuit l’historien, « les pouvoirs publics semblent se désintéresser de la marine marchande à laquelle ils ne comprennent que peu de choses. Ils oublient que la prospérité et la grandeur d’un pays sont faites des entreprises particulières de chacun de ses enfants ».
LE PREMIER VOYAGE DU FRANCE II POUR GLASGOW,
PUIS LA NOUVELLE-CALÉDONIEA Glasgow, en Ecosse, en revanche, l’admiration est unanime. Et ce 25 novembre 1913, c’est au milieu d’une foule émerveillée qu’après avoir fait le plein de passagers, le plus grand de tous les voiliers gonfle sa gigantesque voilure et prend le cap de la Nouvelle-Calédonie. Il n’y a à bord que 45 hommes d’équipage, mais le navire est facile à manœuvrer. Ses qualités nautiques sont superbes.
Après 92 jours de mer, les côtes de la Nouvelle-Calédonie sont atteintes. Le pari fou de Henri-Victor Prentout-Leblond est gagné. Mais bientôt, la première guerre mondiale va éclater. Le trafic maritime va être bouleversé. Pourtant, le nickel devient un minerai particulièrement stratégique pour la fabrication des armes. Cette période sera lourde de conséquence pour le plus grand voilier du monde.