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    5 questions à… Levay Roy

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    Cette série d’interviews met en lumière des personnalités influentes qui partagent leur vision sur des thèmes clés de l’actualité calédonienne. Aujourd’hui, nous rencontrons Levay Roy, agriculteur, président de la Fédération nationale des syndicats agricoles de Nouvelle-Calédonie (FNSEA) et président du comité de Foire de Bourail.

    NouméaPost : Selon vous, la Calédonie a-t-elle les moyens de sortir de la crise actuelle ?
    Levay Roy : Absolument, je suis convaincu que la Calédonie peut surmonter cette crise, comme elle l’a fait à plusieurs reprises dans son histoire. Les défis sont nombreux, mais je crois profondément au bon sens et à la résilience des Calédoniens. Si chacun met de côté les divisions et fait preuve de solidarité, nous pourrons avancer ensemble. Cette crise a révélé beaucoup de failles, mais elle a aussi montré que nous avons les ressources et les talents pour rebondir.

    NP : Comment la brousse a-t-elle vécue les évènements de 2024, et comment en vit-elle les conséquences aujourd’hui ?
    LR : Elle en souffre, comme toute la Calédonie. La brousse, c’est beaucoup d’agriculteurs et nous sommes particulièrement touchés car nous avons du mal à écouler nos produits : les gens partent, le pouvoir d’achat baisse… On remarque aussi une nouvelle dynamique : beaucoup de personnes ont perdu leurs emplois et se mettent à l’agriculture pour tenter de se dégager un revenu, sauf qu’en arrivant sur le marché, ils impactent les professionnels déjà présents. D’autant plus que beaucoup de nouveaux petits agriculteurs ne déclarent pas, contrairement aux agriculteurs professionnels qui doivent payer toutes les charges inhérentes à leur activité. Au-delà du secteur agricole, on remarque que nous recevons un grand nombre de CV de personnes qui n’ont plus d’emplois. Même si la majorité des dégâts se situent sur Nouméa, nous en subissons également les conséquences indirectes. En parallèle, plusieurs indicateurs nous montrent que le climat économique est dégradé : de plus en plus de parcelles se font voler, du bétail tué… Depuis la levée du couvre-feu, on voit ce genre de choses augmenter.

    NouméaPost : Quel est l’état du système agricole calédonien ?
    LR : Notre modèle agricole se trouve à un tournant, il commence à montrer ses limites. Chaque année, 13 milliards sont alloués au secteur agricole, mais seuls 3 milliards atteignent les producteurs. Le reste est absorbé par les structures administratives. La logique voudrait que ce soit le contraire, c’est d’ailleurs ce qui est fait dans les autres pays.

    Depuis plusieurs années, les agriculteurs doivent faire face à des crises successives : Covid-19, La Niña, et maintenant, les émeutes. Le secteur de l’agriculture se sent délaissé. On entend beaucoup de choses, mais ce sont souvent des études, des réunions, des congrès… Sur le terrain, nous sommes toujours en souffrance. Face à la baisse de la demande, on nous demande de réduire nos quotas de production, ce qui entre en contradiction avec la politique d’autosuffisance alimentaire promue ces dernières années et pour laquelle nous avons investis.

    Néanmoins, ces contrecoups ne nous empêchent pas d’avancer. Pour 2025, nous prévoyons d’ouvrir une nouvelle coopérative agricole : elle permettra d’améliorer la traçabilité des produits, de renforcer la relation entre producteurs et consommateurs, et de proposer des prix plus accessibles en limitant les marges. Au-delà de l’aspect économique, ce projet porte une dimension éducative. Nous voulons réconcilier les Calédoniens avec l’agriculture locale, en les sensibilisant aux fruits et légumes de saison et en leur proposant des recettes faciles pour découvrir de nouveaux produits.

    NP : Parlons maintenant de la Foire de Bourail. Vous avez annoncé les dates, du 15 au 17 août. À quoi s’attendre ?
    LR : Retour aux fondamentaux ! Comme on l’avait promis l’an dernier, la Foire de Bourail revient, et bien à Bourail. Agriculture, artisanat, culture broussarde, la Calédonie pure et dure. On a entendu les critiques qui disent que la Foire de Bourail, « c’est toujours la même chose », donc on compte bien amener des nouveautés, mais sans s’éloigner de ce qui fait notre essence : la terre et le savoir-faire. Cet événement est une opportunité de dynamiser notre territoire et de montrer ce que la Calédonie a de meilleur à offrir, tant au niveau local qu’international. Nous avons vu une belle solidarité fin 2024 quand les Calédoniens de partout sur le territoire sont descendus sur Nouméa pour participer à l’effort collectif et soutenir les artisans locaux. Dans six mois, on aimerait voir le même élan de solidarité dans l’autre sens, que les gens de Nouméa montent jusqu’à Bourail pour soutenir les artisans. Ils ont bien besoin, surtout cette année.

    NP : Côté Royal Caledonia Show, êtes-vous contents de la première édition et faut-il s’attendre à une deuxième édition en 2025 ?
    LR : C’était un pari risqué, mais nous l’avons relevé. Encore merci à tous ceux et celles qui se sont investis pour que ça fonctionne. Malgré un contexte très difficile et un lieu inédit, nous avons réussi à valoriser nos savoir-faire et à montrer que la brousse reste debout. Alors oui, c’était loin d’être parfait, mais pour nous ça reste une belle réussite. Quant à une deuxième édition, c’est encore incertain. Cela dépend de plusieurs facteurs, notamment des ressources disponibles et de la conjoncture économique. Pour l’instant, nous nous concentrons sur la Foire de Bourail, qui reste notre priorité. Mais qui sait, peut-être que le Royal Caledonia Show reviendra…

    Kim Jandot

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